L’esthétique du repas pour nos séniors.
En vieillissant l’appétit et l’envie de cuisiner ont tendance à diminuer. Cela peut entraîner à terme une situation de dénutrition, on l’estime aujourd’hui à environ 4 à 10% chez les personnes âgées vivant à domicile. Il est donc primordial de garder le plaisir de manger, de prendre soin de l’esthétique des repas qui est servi à nos séniors à leur domicile. L’alimentation devient un enjeu de santé et de qualité de vie.
L’importance de l’esthétique des repas dans le plaisir de manger.
Définition de l’esthétique.
L’esthétique peut être définit comme une recherche à la perception et la sensation du beau.
La notion de repas et du plaisir de manger.
Un repas est un ensemble de nourriture composée de divers mets et de boisson que l’on consomme à des heures précises de la journée. Il est souvent perçu comme un acte naturel car il répond à la satisfaction de besoins physiologiques essentiels. Mais le repas n’est pas uniquement pensé comme un moyen de se rassasier.
En effet, manger c’est aussi un plaisir. Tout d’abord celui des sens : le goût, l’odorat, le toucher, la vue mais aussi l’ouïe peuvent être tous en éveil lorsque l’on s’alimente. Il y a aussi le plaisir de partager un moment avec les autres, d’expérimenter des recettes parfois un peu étrange ou tout simplement celui de se laisser aller à la gourmandise.
La présentation des plats.
Une étude Israélienne de 2016 met en évidence la relation entre la présentation d’un plat, la prise alimentaire et l’appréciation de celui-ci.
Les plats retravaillés au niveau visuel sont liés à une plus grande appréciation et à une plus grande quantité mangée (moins de gaspillage alimentaire) que les plats qui n’ont pas été retravaillés. Une assiette bien présentée sera mieux accueillie et influencera positivement la perception du plat.
L’esthétique d’une assiette est donc primordiale pour ouvrir l’appétit qui a tendance à diminuer avec l’âge.
Le plaisir de nos sens dans l’alimentation.
La vue.
La vue est probablement un des sens auquel nous accordons le plus d’importance. En effet, il nous permet d’observer et d’analyser l’environnement du monde qui nous entoure.
Ce sens oriente directement notre choix alimentaire. Grâce à lui, nous pouvons déterminer :
- aspect : mat ou brillant, limpide ou trouble, rugueux ou lisse, … ;
- forme : sphérique, aplatie, … ;
- état : liquide, solide, gazeux ;
- couleur ;
- la fraicheur d’un produit ;
- cuisson
- …
Par la suite il nous permet de qualifier un produit comme « attirant » ou « repoussant ». Cependant il ne nous permet pas de déterminer s’il sera bon.
Le toucher.
Le toucher est le sens qui permet de distinguer des sensations tels que le chaud, le froid, la douleur, le poids, la consistance des objets et leurs dimensions. La peau constitue l’organe le plus grand du corps humain. Elle représente 16 % de son poids total. Elle est dotée de capteurs sensorielles.
Dans l’alimentation, ce sens nous permet de définir,
- texture d’un aliment (lisse, rugueux,…), par caresse ;
- consistance (dur , mou, moelleux, …), par pression ;
- température (chaud, froid, tiède) ;
- maturité.
Le toucher en main se distingue de celui en bouche. Le toucher en main confirme ou
infirme les sensations perçues par la vue avant la consommation, en estimant la texture,
la consistance et la température. Alors que le toucher en bouche a un rôle primordial lors
de la dégustation et la recherche de plaisir, il permet de ressentir la température et la
texture d’un aliment.
L’ouïe.
Le son est une sensation auditive provoquée par une vibration. Il existe deux sources de bruits :
- les bruits environnementaux: ils correspondent aux bruits de la cuisine lors d’une préparation et aux bruits autour de la table (les bruits des couverts dans l’assiette, les discussions, …). C’est bruits mettent en avant un contexte de plaisir et de convivialité.
- les bruits en bouche : ces bruits résultent du contact de l’aliment avec la dent lors de la mastication. Cette caractéristique est en fonction de l’état de l’aliment (texture, et consistance). De nombreux autres facteurs interviennent et peuvent perturber un repas: l’état émotionnel, le dérangement, la télévision,…
L’odorat.
L’odorat est le sens qui permet la perception des odeurs. Ces récepteurs sont
localisés dans les fosses nasales. L’odorat de l’être humain permet de dissocier des odeurs subtiles (parfums, œnologie,…). Chaque aliment est caractérisé par une odeur spécifique.
Il est également sollicité lors de la mastication d’un aliment, puisque de nouvelles
molécules se libèrent.
Dans l’alimentation, l’odorat fonctionne avec le phénomène d’association, l’odeur d’un lieu
ou d’un événement nous évoque des souvenirs et nous rappelle le plat en question.
Par exemple :
- l’odeur présente dans une boulangerie, nous rappelle le goût du croissant, du pain, … ;
- l’odeur des fêtes de Noël nous évoque le goût de la dinde aux marrons ;
Le nez est un organe indispensable à la dégustation puisque l’odeur prend part dans 90% de la perception du goût, il nous permet de flairer la fraîcheur et la comestibilité d’un aliment.
Le goût.
Lors de l’introduction d’un aliment dans la bouche, ce dernier est broyé par la mâchoire et
la digestion commence avec la salive. Cette étape libère de nouvelles molécules, qui vont
stimuler les récepteurs gustatifs situés sur les papilles gustatives de la langue et de la
paroi supérieure du pharynx.
Ces récepteurs sont régulièrement détruits par la salive, des brûlures, l’ingestion de
médicaments, l’âge, la consommation d’épices…, et sont régénérés très régulièrement
(tous les 10 à 15 jours).
On distingue 4 saveurs :
- le sucré : seule cette saveur est innée, elle est reconnue et appréciée dès le nourrisson puisqu’elle est synonyme d’énergie ;
- le salé : fait ressortir le goût des aliments dans une quantité limitée ;
- l’acide : un réflexe spontané nous fait grimacer, sans pour autant que l’aliment possède un mauvais goût ;
- l’amer : saveur peu courante dans notre alimentation et généralement peu appréciée ;
La présentation des plats.
Un enjeu pluridisciplinaire.
Parce que manger doit être un plaisir pour tous, l’aide à la préparation des repas est avant tout un moment de convivialité et d’échange.
Les soignants ou/et les aidants intervenant ont un rôle central dans l’alimentation des personnes âgées. Il est essentiel de les informer sur l’importance de la présentation des plats livrés. Il est possible d’améliorer celle-ci grâce à quelques astuces tout à fait réalisable et à la portée de tous.
Astuces de présentation.
Soigner la présentation des plats.
De nombreuses études attestent du fait que l’aspect esthétique joue un rôle important dans la stimulation de l’appétit, et compense même la diminution du goût et de l’odorat.
Dans le cas du portage de repas à domicile :
- il est conseillé de présenter le plat dans une assiette et non en baquette ;
- il est préférable de ne pas mélanger les aliments. Ils peuvent être disposés de façon à faire ressortir les couleurs et donner du volume et de la profondeur au plat ;
- des verrines peuvent être utilisées pour les hors d’œuvres, les desserts type compotes et entremets, ainsi que pour les plats mixés.
- ne pas hésiter à utiliser des condiments (herbes et épices) s’ils sont appréciés. Cela apporte de la couleur et peut par ailleurs compenser la perte du goût et de l’odorat.
Menu équilibrés.
Si les seniors éprouvent parfois des difficultés à avaler certains aliments, cela ne doit en aucun cas se répercuter sur l’équilibre de leur alimentation. Une personne âgée doit avoir une alimentation diversifiée.
Des repas avec du goût.
Une cuisine épicée n’est pas qu’une occasion de faire voyager et partager une autre culture : la diversité des saveurs est la clé d’un appétit retrouvé. Des recettes relevées et originales sauront stimuler les papilles, et lutteront contre la perte de goût et d’odorat.
Le temps du repas.
- Il est judicieux que la personne prenne son temps pour manger et soit le plus autonome possible dans ses gestes quotidiens ;
- il est important pour le sénior que le moment du repas se déroule dans un certain cadre (jolie nappe, jolie vaisselle, bouquet de fleurs sur la table, plat décoré d’un brin de persil ou d’une rondelle de citron…) ;
- être installé confortablement à table ;
- pour les proches, essayez de partager son repas chaque fois que c’est possible, car manger ensemble, c’est partager un moment de plaisir, être près de lui pour lui tenir compagnie même si vous ne partagez pas son repas ;
- si elle a du mal à se servir de couverts, il est possible de l’aider à couper sa viande. Pensez aussi à lui procurer des couverts ergonomiques adaptés ;
- inviter de temps en temps des amis, les petits-enfants…
Les petites portions.
Se nourrir peut être synonyme d’angoisse pour la personne âgées, et il s’agit de lui (re)donner confiance et plaisir à manger. Lui servir une grande assiette, trop copieuse, c’est prendre le risque de l’écœurer avant même qu’elle ait gouté le repas servi. Plutôt que de la servir en trop grosse quantité, privilégiez les petites portions. En effet, le fait d’avoir fini son assiette entraine une satisfaction à la fin du repas quelque soit la quantité ingérée. Mieux vaut un peu que pas du tout !
Article co-écrit avec Léa MARTIN, stagiaire en diététique, dans le cadre de son mémoire.